Géologie du Calcaire Dévonien
de l'unité de Châteaupanne - Chaudefonds

Dans cette page nous vous proposons un aperçu de la géologie des calcaires du Dévonien angevins - les pierres à chaux - et en particulier de l'unité de Châteaupanne-Chaudefonds. Ces recherches géologiques ont été réalisées en grande partie par les étudiants de l'Université d'Angers, pilotés par leur professeur : Fabrice Redois, et en partenariat avec l'Association Ste-Barbe des Mines.
Vous pouvez cliquer sur les photos pour les agrandir.
Note importante : lorsque ce n'est pas signalé, les photos sont de Fabrice Redois.


C’est à partir de leurs observations de terrain et en laboratoire, que les géologues proposent le découpage du Massif armoricain en grandes unités géologiques, elles-même divisées en sous-unités. C’est ainsi que l’unité de Châteaupanne-Chaudefonds apparaît sur les cartes géologiques à l’intérieur du Bassin d’Ancenis dans le domaine dit « ligérien ».

L’unité de Châteaupanne-Chaudefonds, c'est quoi ?

Il s’agit d’un ancien bassin sédimentaire qui résulte d’une histoire complexe ; celle du Bassin d’Ancenis, interprété comme étant notamment un bassin en « pull appart » formé le long de grandes cassures où les blocs coulissent latéralement les uns par rapport aux autres : les failles en décrochement. Celles-ci étaient orientées globalement suivant une direction de 110 à 120° par rapport au Nord ; direction que l’on retrouve « inscrite » dans les roches de cette unité.
Le principe du pull-appart est simple : Prenez une faille (1).
Si les mouvements le long de cette faille font coulisser les deux blocs (flèches jaunes) , une ouverture se forme et le bassin ainsi créé devient un lieu privilégié pour la sédimentation (2).

Les roches qui caractérisent l’unité de Châteaupanne-Chaudefonds sont essentiellement des roches composées de débris d’autres roches (roches détritiques terrigènes : schistes, grès, conglomérats) mais les plus connues et exploitées sont les calcaires.
En observant la répartition de ces calcaires sur des cartes géologiques, on constate qu’ils sont alignés entre Châteaupanne (Montjean-sur-Loire) et Chaudefonds-sur-Layon en suivant une direction N110-N120° par rapport au Nord. Cette orientation est en grande partie liée aux contraintes locales qui sont à l’origine de la chaîne hercynienne, dont la formation a débuté dès le Dévonien au Paléozoïque (ère Primaire). La répartition sous forme de lentilles discontinues de ces calcaires fait encore l’objet d’interrogations et d’hypothèses par les géologues qui cherchent à mieux connaître l’histoire géologique de ce secteur complexe.
Les fossiles contenus dans les calcaires ont permis de dater leur formation au Dévonien vers 380 Millions d’années. Leur identification a également permis de reconstituer les paléoenvironnements (anciens milieu de vie et de dépôt) comme étant un milieu marin peu profond, relativement calme, dans des eaux assez chaudes et probablement suffisamment claires pour laisser passer une partie de la lumière. Durant cette période, les géologues pensent que l’Anjou se trouvait baignée par une mer aujourd’hui disparu et située au niveau de la zone intertropicale.

Fossiles rencontrés dans les calcaires du Dévonien

Les fossiles trouvés dans les calcaires du Dévonien sont essentiellement le témoignage d’une faune marine benthique – qui vivent sur ou dans le sédiment – typique de mer chaudes.
Dans la carrière de Châteaupanne on trouve des fossiles d’algues : les « dasycladales » (photo ci-contre d'A-L Monnin).
Elles se présentent sous forme de traînées blanchâtres et étincelantes au soleil.

On peut aisément trouver des fossiles de stromatopores dans les carrières de Pincourt et St-Charles. Ces fossiles se présentent sous la forme d’une succession de cercles concentriques. La taille des stromatopores peut varier de quelques centimètres à plusieurs décimètres (photo ci-contre A-L M).

Le climat tropical du Dévonien était propice au développement des coraux et tabulés coloniaux, des coraux solitaires ainsi qu’au développement des brachiopodes – animaux avec deux coquilles différentes.
Ainsi, on trouve dans quasiment toutes les carrières de calcaire de l'axe Châteaupanne/ Chaudefonds ce type de fossiles.

L’érosion différentielle (processus par lequel les parties les moins dures de la roche s’érodent en premier) fait apparaître les fossiles de coraux coloniaux en trois dimensions et nous permet de mieux comprendre leur morphologie.

On trouve également des crinoïdes appartenant à la famille des oursins et étoiles de mer, bien qu’ancrés dans le sédiment par une longue tige. Ce sont les segments de ces tiges (ou entroque) que l’on retrouve fossilisés. Ces fossiles se présentent généralement sous forme de rondelles d’environ 5mm avec un trou au milieu : le canal axial.

Ces calcaires dévoniens ont subi des contraintes au cours de la formation de la chaîne hercynienne. Ces contraintes induisent des plis, des failles et des diaclases (fractures sans déplacement) dans les roches. Ces fractures sont souvent soulignées par des filons de calcite ; un minéral reconnaissable à ses cristaux aux faces losangiques délimitant de parfaits rhomboèdres (toutes les faces sont des losanges). La transformation des sédiments en une roche consolidée (diagenèse) permet également d’expliquer la présence de lignes qui rappellent les tracés d’électrocardiogrammes irréguliers : les stylolithes.


Photo A-L M

Photo A-L M

Autres curiositées

L’érosion a mis à jour ces anciens sédiments et les propriétés du calcaire vis-à-vis de l’eau ont permis des phénomènes de dissolution partielle de ces roches. Ces processus que l’on observe dans les régions calcaires comme les gorges du Tarn, dans le Vercors, etc. sont à l’origine des petits karsts de l’unité de Châteaupanne- Chaudefonds. Des cavités sont visibles (cf photo ci-dessous) et certaines d’entre elles ont servi d’abri pour les animaux et surtout pour les hommes les plus anciens trouvés à ce jour en Anjou (site de Roc-en-Pail à Chalonnes).
Certaines de ces cavités ont par la suite été naturellement comblées par des sédiments variés selon les sites : des argiles parfois silicifiées (transformés en silice) au Fourneau Noble de Chalonnes, … ; des sables et graviers d’âge discuté ou discutable à Chaudefonds, l’Orchère de St Aubin de Luigné, … ; du falun de 10 MA à Pincourt et la carrière du Petit Lapin à Montjean (on parle alors de discordance). A la carrière du Petit Lapin (qui est malheureusement en cours de comblement par des déchets), on peut même observer que le calcaire, avant d’être recouvert par les sables coquillers du falun, ont été percés de trous de phollades : des lamellibranches que l’on observe également sur nos côtes, notamment du côté de Jard-sur-Mer (les fameux cailloux à trous).

L’unité de Châteaupanne-Chaudefonds n’a pas encore révélé tous ces secrets : des travaux sont en cours pour affiner la datation des calcaires, pour mieux comprendre leur disposition vis-à-vis des autres roches, … Cette unité recèle également de sites pédagogiquement importants et suffisamment explicites pour permettre à tous de comprendre que notre planète est vivante et riche d’une histoire ô combien passionnante pour ceux qui veulent la déchiffrer dans les archives de la Terre et faire partager leurs découvertes.

 

Textes de Fabrice Redois et Anne-Laure Monnin,
Arrangés par François Martin